Le dimanche 20 mai 2018, les Spiritains de Rome et leurs invités ont célébré la fête de la Pentecôte. C’est l’anniversaire de leur fondation en 1703. La célébration était présidée par le Cardinal Pietro Parolin, Secrétaire d’Etat au Vatican.
Homélie du Cardinal Pietro Parolin
Fête de la Pentecôte – Rome, le 20 mai 2018
Chers frères et sœurs en Christ,
« L’esprit du Seigneur a rempli l’univers, Lui que tout rejoint, il connaît toutes les langues … », chante aujourd’hui l’antienne qui introduit cette célébration solennelle en ce jour de Pentecôte.
Enivrés, comme les apôtres dans le cénacle, par la présence divine de l’Esprit Saint, qui nous unit dans un seul cœur et une seule âme, dans la sainte Eucharistie, nous nous laissons modeler par le feu de son Amour pour devenir avec Jésus, une offrande agreable au Père.
Je salue avec affection fraternelle vous tous ici présents, à commencer par le révérend Supérieur Général, le Père John Fogarty, je le remercie de m’avoir invité à présider cette Eucharistie dans un jour solennel pour la Congrégation du Saint-Esprit, fondée, comme il l’a rappelé, le jour même de la Pentecôte 1703, par Claude Poullart des Places, et consacrée à l’Esprit.
Avec lui, je salue également les membres du Conseil général et tous les Pères du Saint-Esprit, ceux qui sont ici présents et ceux qui sont dispersés dans plus de 60 pays à travers le monde, engagés depuis plus de 200 ans dans l’évangélisation, en particulier chez les pauvres et lá où la foi chrétienne est peu connue et minoritaire.
Je vous ai connu à travers le travail accompli par la Congrégation dans le sud du Nigeria, grâce à l’éducation et les écoles, liée à la splendide figure de l’évêque Joseph Shanahan, vénéré et bien-aimé par les chrétiens qui ont voulu ses restes mortels dans la cathédrale d’Onitsha (Nigeria) et dont on a introduit la cause de béatification en 1997.
Enfin, je salue tous les amis et les personnes qui sont venus partager la joie et la prière de cette journée, en commençant par le cardinal Francis Arinze. Il m’a d’abord dit, que s’il n’y avait pas les Pères Spiritains, je ne serais pas là, clairement pour le grand travail fait par tous les Spiritains dispersés dans le monde. Je remercie également les Sœurs Comboniennes qui nous accueillent ici dans leur chapelle à l’occasion de cette célébration.
Même s’il n’est pas facile de parler de l’Esprit Saint à ceux qui vivent quotidiennement de cette consécration et qui sont en position d’être presque maîtres en ce qui concerne la réalité et la relation avec la troisième personne de la Sainte Trinité. Avec l’humilité de la foi que Marie nous enseigne dans son cantique de louange à Dieu, le Sauveur, j’essaie de partager avec vous ma manière de ressentir l’Esprit Saint, en me laissant guider par la parole que nous venons d’entendre.
La première lecture se concentre sur le cinquantième jour de la Pâque, il y a près de deux mille ans, quand, à Jérusalem, avec le peuple d’Israël, réunis pour la mémoire de la communication et le renouvellement de l’ancienne alliance, a été réalisé cet événement unique qui aujourd’hui est le cœur de notre célébration.
Le Père glorifié dans le Christ envoie l’Esprit Saint qui a parlé à travers les prophètes pour commencer la réalisation définitive de son plan de salut dans l’histoire de l’humanité.
L’Esprit Saint descend à l’endroit où les apôtres sont rassemblés avec Marie, se révéle par un vent impétueux qui emplit toute la maison et qui est entendu par les gens qui, entretemps, se sont rassemblés devant le cénacle.
Dans le signe des langues de feu qui reposent sur chacune des personnes présentes, l’Esprit remplit chaque personne de son rôle divin, les rendant capables de parler dans d’autres langues.
Dans le feu, soudainement apparu, sans raison humainement plausible, il implique tous ceux qui sont présents, avant même qu’ils puissent être en désaccord ou consentir, en leur permettant d’annoncer dans d’autres langues, les grandes œuvres de Dieu.
En outre, originaires tous de Galilée, ils sont entendus parler dans leur langue maternelle par tous ceux qui son présents,. Il est clair que commence dans le monde, le chemin opposé à celui de la dispersion de Babylone. L’Esprit Saint nous aide à nous comprendre les uns les autres, à créer la communion, à établir ces liens et cette proximité là où règnaient la séparation et l’hostilité.
Dans la seconde lecture de la lettre aux Galates, Saint Paul exhorte les chrétiens de cette communauté à marcher selon l’esprit pour éviter de tomber esclaves des désirs de la chair et avoir ainsi cru en vain.
C’est l’Esprit qui donne, en effet, la force de rester fidèle à la vraie liberté que le Christ nous a acquise par sa mort et sa résurrection dans laquelle nous avons été faits participants au baptême et où le péché, la chair et toutes les tentations ont été crucifiés.
C’est toujours Lui qui engendre en nous ce mécanisme d’amour capable de produire en nous tous les dons énumérés par l’apôtre. Le fruit de l’esprit c’est l’amour, la joie, la paix, la magnanimité, la bienveillance, la fidélité, la bonté, la douceur, la maîtrise de soi. Comme il l’a formé dans l’obéissance au Père, avec la puissante de sa grâce, l’Esprit nous forme aussi, afin de ne pas nous conformer à la mentalité de ce siècle.
Et enfin, le texte de l’Évangile qui unit les passages des discours de Jésus au cours de la dernière cène, dans lequel est annoncée la venue de l’Esprit et de son œuvre, qui consiste à rendre témoignage à Jésus et guider l’Église et l’humanité vers toute la vérité.
Quand Jésus dit que l’Esprit de vérité vous guidera vers toute la vérité, il ne s’agit évidemment pas d’une simple connaissance intellectuelle car elle implique la réception de celui qui est connu dans une rencontre qui aboutit à une communion de vie avec Dieu lui-même.
L’Esprit Saint nous guide vers la vérité en ouvrant nos yeux sur l’invisible, afin de vivre toujours plus attachés à cette indicible et connaître la réalité selon Dieu, en sortant de la convoitise des yeux, si envahissante et dévastatrice à nos jours, et qui broulle l’esprit et le cœur, nous empêchant de tenir les yeux fixés sur le mystère de la grâce dont nous faisons partie.
L’Esprit Saint met en œuvre en nous la présence active de l’absolu qui approfondit notre vie intérieure, en la faisant vivante, chaleureuse, aimante. Il crée en nous le cœur intérieur qui nous ouvre à la dimension transcendante pour l’éternité et en même temps nous met en communion avec l’autre.
C’est l’Esprit qui provoque le fruit des grâces, nourrit le repentir de notre infidélité, dirige et renforce l’espoir de participer à la vie donnée par la Parole.
Faire confiance à la vérité signifie nous donner la liberté d’agir de façon évangélique pour apprendre à nous rapprocher de tous ceux que nous rencontrons au cours de notre chemin. Se rendre capable de vivre le commandement de Jésus: “Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés“, toujours et á jamais.
C’est l’Esprit Saint qui nous donne la possibilité de faire ce que nous n’aurions jamais cru possible : comment aimer nos ennemis, tendre l’autre joue ou sacrifier sa vie à l’exemple de Jésus.
Ce travail de l’Esprit Saint n’est pas seulement un processus personnel, mais aussi un processus institutionnel.
Par l’Esprit, le Christ forme l’Église comme son épouse, lui donnant l’énergie nécessaire pour une action de conviction et non de contrainte et la rend féconde parce qu’elle se répand dans le monde entier en tant que communauté missionnaire.
L’Esprit à la Pentecôte a transformé un groupe d’hommes repliés sur eux-mêmes en missionnaires courageux et convaincants, ouverts au monde entier. Le nouveau testament est unanime à témoigner que seul l’Esprit est capable de transformer un homme et une femme en missionnaire de l’évangile.
Sans l’Esprit, il n’y a pas de mission. Précisément parce qu’elle est générée par l’Esprit et toujours accompagnée de sa présence, la mission ne s’impose pas à l’homme de l’extérieur, mais à une passion qui éclate de l’intérieur. Nous ne pouvons pas garder pour nous ce que nous avons vu et entendu, nous ne pouvons que partager la joie de la rencontre avec le Christ, qui continue à produire en chacun de nous. C’est la mission.
En même temps, l’Esprit purifie l’Église des obstacles, des incohérences qui entravent la diffusion de l’Evangile et l’édification du royaume de Dieu. Il la libère de tous ces fardeaux qui l’engagent avec l’esprit du monde de tous les temps et de cette autosatisfaction qui obscurcit la présence vivante du Seigneur au milieu d’elle. Rappele-toi d’où tu viens, convertis-toi, fais les œuvres d’auparavant.
Dans un temps comme celui que nous vivons, il faut regarder où l’Esprit suscite effectivement la redécouverte de l’Evangile, ce qui aujourd’hui nous paraît insignifiant, fragmantaire, dispersif, que peut-être nous ne comprenons pas, nous ne déchiffrons pas, dans tant de choses qui se passent dans ce monde, voici que tout cela demain sera peut-être le fondement de la nouveauté que Dieu apporte continuellement à ce monde.
Un critère fondamental d’action pour vous, frères de la Congrégation du Saint-Esprit, qui vous avez choisi de consacrer votre vie d’une manière particulière à l’Esprit Saint, dont le champ spécifique d’apostolat est pour ceux qui n’ont pas encore entendu le message de l’évangile, ou ceux qui viennent de l’écouter, avec les opprimés et les plus défavorisés, en tant qu’individus et communautés dans les endroits où l’Église trouve difficile d’avoir des travailleurs.
Je conclus mes réflexions avec quelques mots significatifs du Pape François, prononcés récemment:
- Jésus ressuscité dit: Faites des disciples, voici la mission. Il ne dit pas de conquérir …. mais faites … Faites des disciples, c’est-à-dire, partagez avec les autres le don que vous avez reçu, la rencontre de l’amour qui a changé votre vie.
- Le cœur de la mission est de témoigner que Dieu nous aime et qu’avec Lui il est possible de vivre comme de vrais hommes et de donner vraiment la vie partout : dans la famille, au travail, comme personnes consacrées ou mariées.
- La mission est de redevenir disciples, les nouveaux disciples de Jésus et de se redécouvrir en faisant partie de l’Église, qui est disciple. Bien sûr, l’Église est maitresse, mais elle ne peut pas être enseignante si elle n’est pas disciple auparavant, comme elle ne peut pas être mère si elle n’est pas fille auparavant.
- Voici notre mère, une humble Église qui est la mère et la disciple du maître, heureuse d’être une soeur de l’humanité. Et cette dynamique de disciple, disciple qui fait des disciples, est totalement différente de la dynamique du prosélytisme.
- Frères, sœurs, ouvrons nos cœurs au Saint-Esprit. C’est dans le cœur que nous prions l’Esprit, que l’Église appelle: “doux hôte de l’âme, doux hôte du cœur”, dit le Pape François.
C’est dans le cœur que l’Esprit agit, mais dans un cœur fermé, il ne peut pas entrer. Et où achetez-vous les clés pour ouvrir votre coeur? Non…. c’est un cadeau aussi. C’est un don de Dieu : “Seigneur, ouvre mon coeur, afin que je puisse recevoir le Saint-Esprit. “
Nous pouvons prier avec Sainte Catherine de Sienne: “ O Esprit Saint, viens dans mon coeur avec ta puissance, attache-moi à toi, à Dieu, afin que je puisse brûler d’amour avec crainte.”
“Viens à nous, Saint-Esprit, aide-nous.
Viens dans nos coeurs, enseigne-nous ce que nous devons faire.
Montre-nous le chemin à suivre
Mets en nous, ce qui nous est demandé.
Amen ! “
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